Vous aimeriez habiter une maison comme celle-ci, vivre dans un décor comme celui-ci ? Moi, oui. Peut-être pas toute l'année, mais durant l'été, oui. L'hiver doit être assez rude et long à cet endroit. Car cette maison est située au Québec, à l'Est, en Gaspésie, plus précisément, près de Gaspé, tout près de la mer, comme on peut le voir. Cette maison se trouve dans la partie verte, à droite, près de Cap-des-Rosiers...
Cela n'a pas de rapport direct avec le sujet de ce billet, sinon celui de me sentir quelque peu solidaire des Québécois de cette région, mais je suis né et j'ai grandi, jusqu'à l'âge de 15 ans, dans un petit village que l'on ne voit pas sur cette la carte ci-dessus, situé au sud de Causapscal, plus près de Matapédia que l'on peut deviner tout à fait dans le coin inférieur gauche. Je vivais donc assez loin de la mer et quand les copains de Montréal me traitaient de « morue » parce que selon eux je venais d'une région de pêche, je devais les démentir car je n'étais pas gaspésien, mais plutôt du Bas-Saint-Laurent et, quand nous allions à la pêche, nous ne partions pas en mer mais nous allions plutôt vers les rivières, pêcher la truite et le saumon. Sauf que la pêche au saumon était interdite, la plupart des droits de pêche au saumon du Québec étant réservés pour une durée de 99 ans aux États-Uniens !!!
Cette jolie maison, la maison Blanchette, dont on se sert pour mousser l'industrie touristique au Québec, elle existe bel et bien, mais elle est inhabitée depuis 37 ans déjà, ainsi que toutes les maisons voisines et tous les villages qui l'entourent.
Et pourquoi donc ? Parce qu'un jour, un ministre du gouvernement du Canada, anglophone unilingue très certainemenent, s'est rendu jusque-là, on se demande bien pourquoi ; il a aimé le paysage, le point de vue sur la mer et comme il n'avait jamais lu l'André Gide des Nourritures terrestres (« Toute chose appartient à celui qui sait en jouir »), il a jugé que tout que cela était trop beau pour appartenir à des particuliers, québécois de surcroît, il a décidé que toute cette région devait devenir un parc canadien.
Comme le gouvernement du Canada a toujours été riche par rapport aux autres gouvernements qui le composent (il l'est devenu encore plus, de manière indécente, ces 15 dernières années : en rendant plus difficile l'admissibilité aux prestations de l'assurance-chômage et en diminuant fortement le montant de ces prestations, le programme de l'assurance-emploi a accumulé des profits de 45 milliards de dollars et, autre scandale qui ne semble pas empêcher de dormir les ministres canadiens, ce gouvernement pige dans les surplus de l'assurance-chômage - l'argent des chômeurs et de ceux qui pourraient le devenir - pour payer ses dépenses courantes et faire de généreux cadeaux à ses amis. C'est le vol du siècle, et le mot « vol » est tout à fait approprié. J'en reparlerai bientôt - vous n'êtes jamais obligés de lire ; les images sont parfois jolies)...
Comme le gouvernement du Canada a toujours été riche par rapport aux autres gouvernements qui le composent (il l'est devenu encore plus, de manière indécente, ces 15 dernières années : en rendant plus difficile l'admissibilité aux prestations de l'assurance-chômage et en diminuant fortement le montant de ces prestations, le programme de l'assurance-emploi a accumulé des profits de 45 milliards de dollars et, autre scandale qui ne semble pas empêcher de dormir les ministres canadiens, ce gouvernement pige dans les surplus de l'assurance-chômage - l'argent des chômeurs et de ceux qui pourraient le devenir - pour payer ses dépenses courantes et faire de généreux cadeaux à ses amis. C'est le vol du siècle, et le mot « vol » est tout à fait approprié. J'en reparlerai bientôt - vous n'êtes jamais obligés de lire ; les images sont parfois jolies)...
Comme le gouvernement du Canada s'arroge le droit de taxer ce qu'il veut et d'intervenir partout où il le veut, même dans les champs de compétences réservées aux États membres de la supposée confédération canadienne, il est riche et fait ce qu'il veut. En 1970, donc, le gouvernement canadien a décidé de créer au Québec un parc canadien ; il s'est entendu avec le maire de Gaspé, promettant la richesse et la création d'emplois pour la région, ce qui ne s'est jamais concrétisé. Ensemble, les deux lascars ont décidé d'exproprier plus de deux cents familles qui habitaient ces maisons, ces villages ; plus de 1 000 personnes ont été expulsées de leur maison, avec une bouchée de pain en compensation.
Le gouvernement du Québec a dû céder au gouvernement canadien cette portion de son territoire. « Le gouvernement est autorisé à donner au gouvernement du Canada libre jouissance des terrains compris dans le territoire du parc Forillon décrit à l'annexe A suivant l'entente intervenue le 8 juin 1970 entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec », dit l'article 8 de la Loi sur le parc Forillon et ses environs adoptée par l'Assemblée nationale du Québec de l'époque. Quatre mois plus tard, c'était l'armée du Canada qui envahissait le Québec, plus particulièrement la région de Montréal, occasion rêvée par les politiciens au pouvoir à Ottawa, de bons Québécois so proud to be Canadians, de faire peur aux Québécois trop sensibles à l'idée de souveraineté ; excellente occasion pour le gouvernement du Canada et ses services de renseignements de profiter de la suspension de toutes les libertés (proclamation de la Loi des mesures de guerre) pour ficher* des milliers de Québécois dont l'ardeur fédéraliste et l'allégeance inconditionnelle à la couronne britannique n'étaient pas assez convaincantes. Mais ça, c'est une autre histoire.
Le gouvernement du Québec a dû céder au gouvernement canadien cette portion de son territoire. « Le gouvernement est autorisé à donner au gouvernement du Canada libre jouissance des terrains compris dans le territoire du parc Forillon décrit à l'annexe A suivant l'entente intervenue le 8 juin 1970 entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec », dit l'article 8 de la Loi sur le parc Forillon et ses environs adoptée par l'Assemblée nationale du Québec de l'époque. Quatre mois plus tard, c'était l'armée du Canada qui envahissait le Québec, plus particulièrement la région de Montréal, occasion rêvée par les politiciens au pouvoir à Ottawa, de bons Québécois so proud to be Canadians, de faire peur aux Québécois trop sensibles à l'idée de souveraineté ; excellente occasion pour le gouvernement du Canada et ses services de renseignements de profiter de la suspension de toutes les libertés (proclamation de la Loi des mesures de guerre) pour ficher* des milliers de Québécois dont l'ardeur fédéraliste et l'allégeance inconditionnelle à la couronne britannique n'étaient pas assez convaincantes. Mais ça, c'est une autre histoire.
1970, c'était l'époque du plus arrogant des gouvernements arrogants, un gouvernement du Parti Libéral, évidemment, celui que les Québécois, avec l'appui d'un bon nombre de Canadiens, ont finalement mis à la porte en janvier 2006. Les Québécois sont patients et tolérants, mais ces Libéraux avaient largement dépassé les bornes de l'arrogance et de l'abus de confiance, quand ce n'était pas de la fraude systématisée comme l'a montré récemment l'enquête de la Commission Gomery.
En 1970, on a donc fermé plusieurs villages de la région et on a créé un parc, administré par Parcs Canada. On trouvera sur le site officiel du parc Forillon beaucoup de renseignements intéressants sur la nature de ce parc, sur sa faune ; on y parle de l'histoire des premiers habitants de cette région mais, étrangement, on ne dit pas un mot sur l'expropriation de ces habitants qui n'ont pratiquement pas décoléré depuis. Le site ne dit pas un mot de cette « déportation des Gaspésiens ».
En 1970, on a donc fermé plusieurs villages de la région et on a créé un parc, administré par Parcs Canada. On trouvera sur le site officiel du parc Forillon beaucoup de renseignements intéressants sur la nature de ce parc, sur sa faune ; on y parle de l'histoire des premiers habitants de cette région mais, étrangement, on ne dit pas un mot sur l'expropriation de ces habitants qui n'ont pratiquement pas décoléré depuis. Le site ne dit pas un mot de cette « déportation des Gaspésiens ».
« Forillon est habité depuis longtemps. Il y a quelque 9 000 ans, des gens de la préhistoire campaient sur les caps bordant la pointe, les terrasses marines de la vallée de L'Anse-au-Griffon et la pointe de Penouille.« Forillon est habité depuis longtemps... », dit le site officiel, habité, oui, jusqu'au jour où le gouvernement du Canada juge que la vie est toujours plus belle quand les humains en sont absents.
« Depuis des siècles, les anses et les graves de Petit-Gaspé jusqu’au Cap-Gaspé ont su séduire les Micmacs ou premiers Gaspésiens, les pêcheurs saisonniers puis les pêcheurs sédentaires. Les plus grandes anses telles l'anse aux Amérindiens, l'anse Saint-Georges et la Grande Grave regroupaient près d'elles des villages. Les plus petites anses accueillaient des établissements domestiques. Des traces qui sont toujours bien visibles aujourd’hui. »
De l'histoire ancienne, ce dossier politique ? Pas du tout. Le 30 novembre 2006, la municipalité de Gaspé présentait à Parcs Canada un mémoire sur l'avenir du parc Forillon. Dans ce mémoire intitulé Forillon : « L'harmonie entre l'homme, la terre et la mer » ou le Gaspésien une espèce en voie de disparition, on parle du drame humain, de la disparition du patrimoine, des engagements non respectés, de l'économie déficiente, de la promesse jamais réalisée de la création de 1 300 emplois, du sentiment d'être abandonnés par ceux qui ont tout promis et qui se désintéressent du sort de ce qu'ils ont créé...
La seule consolation que puissent avoir les Québécois, c'est que ce parc est un malgré tout une réussite touristique. C'est une consolation d'autant plus importante que ce gouvernement du Canada, particulièrement sous le règne de Pierre Elliott Trudeau (1968 à 1984, avec brève interruption), est réputé pour avoir créé d'énormes éléphants blancs (on pensera à l'aéroport de Mirabel, pour lequel on a exproprié les meilleures terres agricoles au Québec, et au moins trois fois plus d'espace qu'il n'en fallait, pour finalement fermer cet aéroport quelques années plus tard, créant encore un désastre humain, écologique, financier dans cette région). Partout où il arrive avec ses gros sabots, ce gouvernement fait le vide, construit de gigantesques structures, froides, sans âme, où personne ne se reconnaît. Ce gouvernement qui dit toujours n'avoir pas d'argent à donner à ceux qui sont chargés d'administrer les soins de santé en a toujours beaucoup à investir dans le béton et dans l'équipement militaire.
La seule consolation que puissent avoir les Québécois, c'est que ce parc est un malgré tout une réussite touristique. C'est une consolation d'autant plus importante que ce gouvernement du Canada, particulièrement sous le règne de Pierre Elliott Trudeau (1968 à 1984, avec brève interruption), est réputé pour avoir créé d'énormes éléphants blancs (on pensera à l'aéroport de Mirabel, pour lequel on a exproprié les meilleures terres agricoles au Québec, et au moins trois fois plus d'espace qu'il n'en fallait, pour finalement fermer cet aéroport quelques années plus tard, créant encore un désastre humain, écologique, financier dans cette région). Partout où il arrive avec ses gros sabots, ce gouvernement fait le vide, construit de gigantesques structures, froides, sans âme, où personne ne se reconnaît. Ce gouvernement qui dit toujours n'avoir pas d'argent à donner à ceux qui sont chargés d'administrer les soins de santé en a toujours beaucoup à investir dans le béton et dans l'équipement militaire.
Cela dit, si vous passez par le Québec, par la Gaspésie, prévoyez au moins une journée au parc Forillon. Il y a quelques années, avec un ami, nous y avions passé une nuit sous la tente, sans électricité ni autre service à proximité, dans la nuit noire en pleine nature ; nous étions entre la forêt et la mer et je me souviens que nous n'avions pas beaucoup dormi à cause du vent.
* Les politiciens ambitieux (pléonasme ?) adorent faire des fiches. En France, le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG, pour les intimes), créé en 1998, devait cibler les délinquants sexuels ; à la suite des attentats de septembre 2001, le gouvernement français en a élargi l'application pour tenir compte des crimes graves contre la personne. Sous le règne de Nicolas Sarkozy au ministère de l'Intérieur, le nombre de personnes fichées est passé de 2 807 en 2003 à plus de 400 000, et ce nombre ne cesse d'augmenter. Pour le vol d'une balle de caoutchouc dans un magasin, par exemple, on demandera à un enfant de 8 ans de donner un échantillon d'ADN et, en raison de ce fichage, cet enfant qui, normalement, devrait grandir, sera privé à vie de l'accès à certains emplois.
« Les empreintes génétiques des condamnés sont gardées quarante ans après la date de condamnation définitive. Les empreintes génétiques de personnes simplement mises en cause lors d'une enquête sont conservées vingt-cinq ans après la date de réquisition par un officier de police judiciaire. Chaque nouvelle condamnation ou mise en cause judiciaire repousse encore la date d'effacement définitive du profil génétique.
« Le refus de se soumettre au fichage génétique, dans le cadre de la loi, expose son auteur à une peine d'emprisonnement et à une peine d'amende », peut-on lire sur Wikipédia. Liberté, Égalité, Fraternité !
+ Édition revue et augmentée le dimanche 1er juillet 2007.
Ajout du 2 juillet 2007 : L'émission Tout le monde en parlait, animée par Anne-Marie Dussault, à la télévision de Radio-Canada, traitera de l'expropriation des Gaspésiens en 1970. C'est diffusé le mardi soir à 19 h 30 et rediffusé sur le réseau RDI plusieurs fois durant la semaine (les archives ne sont conservées qu'une seule semaine sur le site). Plus de renseignements sur l'émission.
Certaines des images proviennent du site officiel du parc Forillon ; d'autres viennent d'ici ; d'autres enfin proviennent de sites touristiques du Québec dont j'ai perdu l'adresse.
* Les politiciens ambitieux (pléonasme ?) adorent faire des fiches. En France, le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG, pour les intimes), créé en 1998, devait cibler les délinquants sexuels ; à la suite des attentats de septembre 2001, le gouvernement français en a élargi l'application pour tenir compte des crimes graves contre la personne. Sous le règne de Nicolas Sarkozy au ministère de l'Intérieur, le nombre de personnes fichées est passé de 2 807 en 2003 à plus de 400 000, et ce nombre ne cesse d'augmenter. Pour le vol d'une balle de caoutchouc dans un magasin, par exemple, on demandera à un enfant de 8 ans de donner un échantillon d'ADN et, en raison de ce fichage, cet enfant qui, normalement, devrait grandir, sera privé à vie de l'accès à certains emplois.
« Les empreintes génétiques des condamnés sont gardées quarante ans après la date de condamnation définitive. Les empreintes génétiques de personnes simplement mises en cause lors d'une enquête sont conservées vingt-cinq ans après la date de réquisition par un officier de police judiciaire. Chaque nouvelle condamnation ou mise en cause judiciaire repousse encore la date d'effacement définitive du profil génétique.
« Le refus de se soumettre au fichage génétique, dans le cadre de la loi, expose son auteur à une peine d'emprisonnement et à une peine d'amende », peut-on lire sur Wikipédia. Liberté, Égalité, Fraternité !
+ Édition revue et augmentée le dimanche 1er juillet 2007.
Ajout du 2 juillet 2007 : L'émission Tout le monde en parlait, animée par Anne-Marie Dussault, à la télévision de Radio-Canada, traitera de l'expropriation des Gaspésiens en 1970. C'est diffusé le mardi soir à 19 h 30 et rediffusé sur le réseau RDI plusieurs fois durant la semaine (les archives ne sont conservées qu'une seule semaine sur le site). Plus de renseignements sur l'émission.